Gasps, saison 1, Maïlis.

J’aime bien sortir de ma zone de confort et savourer de temps en temps, un bon récit post-apocalyptique. La lecture de Gasps de Maïlis m’a en plus permis de découvrir un nouvel auteur, ce qui est toujours une bonne nouvelle pour moi.

Gasps se déroule dans notre monde, mais un monde qui a été sauvagement transformé par la Grande Catastrophe. De nombreux humains sont morts tandis qu’ont émergé les Eveillés, des humains aux fascinantes cicatrices, dotés de pouvoirs variés et plus ou moins dangereux. Une lutte sans merci s’est alors engagé entre les humains assemblés en colonies et les Eveillés, au cœur de plus en plus dur. Une lutte de pouvoir, une lutte sans merci. Une lutte pour la survie.

Pour être honnête, j’ai été un peu désarçonnée par ce roman au début. L’héroïne, dont nous ignorons longtemps le prénom, m’a semblée froide et désagréable. Le masque qu’elle revêt au début m’a glacée. Elle est détachée de tout, elle tue sans scrupule et sans remords, sans merci. Cela fait d’elle un personnage monolithique, et là, j’ai eu vraiment peur car Gasps est malgré tout un petit pavé de plus de cinq cent pages. Avec le recul, je suis convaincue que ce début est un réel choix d’écriture. En un sens, il est très efficace, même s’il repose sur un coup de poker ; il est efficace parce que pas à pas, touche par touche, l’héroïne change et cette lente évolution permet de dynamiser le récit et de nous accrocher toujours un peu plus. Cela tient donc à la fois du mécanisme du suspense et de l’identification au héros puisque bien entendu ce sont des événements précis et humainement émouvants qui amènent à cette transformation. Cela reste un coup de poker – et donc un choix audacieux car le lecteur peut choisir d’abandonner si la figure principale ne l’accroche pas rapidement. Vous l’aurez compris, je suis très contente d’avoir laissé le temps à Ambre de déployer son plein potentiel et de me prouver que rien n’était aussi simple que cela car, finalement, je suis arrivée sans peine à la fin de l’ouvrage.

Ambre – notre héroïne – a plus d’une facettes : héroïne « badass », elle met une raclée à bon nombre de personnages, y compris à des hommes qui font le double de sa carrure. Elle ne sort pas indemne de tous les combats pour autant, et cela m’a plu! J’aime quand les personnages ne sont pas un roc immuable. Elle peut être piégée, elle a des failles – que nous découvrons lentement- , et, à n’en pas douter, elle conserve quelques secrets que je serais curieuse de découvrir, notamment en ce qui concerne sa famille, son prénom, son passé en général.

J’ai apprécié les détails post apocalyptiques inventés par l’autrice : les Eveillés et leur soif de domination, leur cœur qui s’assèche en proportion égale à leurs pouvoirs, les pouvoirs différents de pyrokinésie, de télékinésie, la capacité à converser avec les animaux, à se téléporter, à voler… Tout un univers est mis en scène, et les aptitudes des êtres dessinent une carte du monde et des relations humaines source de surprise et de tensions. La variété des pouvoirs permet de décrire des affrontements variés et saisissants – qui seraient très visuels s’ils s’agissait d’un film ou d’une série. Ainsi, le lecteur peut très bien imaginer les choses et voir ce que les mots laissent entendre. La contrepartie inhérente à ce monde est évidente : les scènes d’affrontement sont légions et je ne compte pas les scènes mentionnant un membre coupé, une nuque brisée, une mort violente tout court. Alors, il faut être prêt à s’y lancer. J’ai parfois été lassée par ces scènes de combats, mais au vu de l’œuvre et de l’univers mis en place, difficile de s’en passer, d’autant qu’aux combats entre Eveillés pour le partage des territoire s’ajoutent les conflits Eveillés / humains et les conflits entre colonies humaines. Les sources de tension entre les personnages sont démultipliées de par les caractéristiques du récit post-apocalyptique et je vois mal comment l’autrice aurait pu faire autrement sans adoucir le monde créé et donc sans transformer totalement ce qu’elle voulait amener au jour.

Les personnages secondaires sont intéressants et permettent – à leur apparition – de dynamiser le récit et de lui donner une inflexion nouvelle : un ennemi qui emporte l’héroïne dans un combat éperdu, les alliés humains qui semblent se méfier, des responsabilités nouvelles qui échoient à Ambre sous la forme d’hôtes embarrassants, des Eveillés de seconde catégorie qui veulent faire clan… Parmi ces personnages secondaires, Mathias est particulièrement horripilant et savoureux pour le lecteur ! Cat et Bastien sont quant à eux aussi touchants que Franck est détestable. Il y a donc de très belles réussites dans la galerie de personnages.

La plume de l’autrice rend le récit dynamique et moderne. Ne vous attendez pas ici à des métaphores ou au suave recours à la poésie : les personnages parlent avec gouaille, sans détour et sans voile de pudeur. La langue est directe, parfois crue et vulgaire, mais elle est conforme au monde violent et cruel mis en place. En cela, la manière de s’exprimer des personnages est authentique – vu le contexte dans lequel ils évoluent. Cela ne plaira peut-être pas à tout le monde, mais cela me semble assez compréhensible. Enfin, le montage romanesque crée des coups de théâtre, et la fin de cette saison 1 nous amène jusqu’à l’acmé du récit, interrompant l’histoire sur un point de tension maximal. Arrivé à la fin de l’ouvrage, nous sommes en apnée, curieux de découvrir la suite, et nous restons sur notre faim avec le bonus.

Ainsi, Gasps est une lecture originale, parfois déconcertante mais assurément savoureuse. Ce récit post-apocalyptique donne à voir un monde fait de combats, de morts et de souffrances au milieu duquel émerge, comme un phénix renaissant de ses cendres, l’entraide et l’amitié. L’héroïne grandit, évolue, change, et, elle qui se pensait seule au monde, découvre que l’humanité est encore vivace sous la carapace de l’Eveil.

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