J’ai un peu hésité à lire ce roman de Dean Koontz, non que je n’aime pas l’auteur, car je suis ses publications depuis mes quatorze ans, mais parce qu’une des mises en avant vantait le lien avec la pandémie que nous connaissons. Mon naturel anxieux et moi tremblions un peu à l’idée de nous égarer entre ces pages, mais mon amie Clem du blog YouCanRead m’a convaincue de tenter le coup, comme je ne l’avais pas écouté – à tort- pour Siège 7b de Fitzek, j’ai tenté le coup.
Les Yeux des ténèbres met en scène une mère, Christina Evans, qui a perdu son petit garçon de dix ans, Danny, dans un terrible accident. Alors qu’elle parvient à peine à faire son deuil et à envisager d’aller de l’avant, des signes la ramènent à cette perte et lui laissent penser que son enfant n’est pas mort. Dès lors, elle tente tout pour savoir, coûte que coûte, ce qu’il en est.
La quatrième de couverture évoque des lectures récentes mettant en avant le lien avec le coronavirus, des coïncidences frappantes avec un virus venu de Chine envisagé il y a quarante ans dans ce roman… C’est à mon sens une erreur de mettre cela en avant car cela fait naître des attentes qui seront déçues. Si vous attendez un roman traitant d’une pandémie, d’un virus infectant la population, vous ne goûterez pas le livre car ce n’est pas là le cœur du l’histoire, loin s’en faut. Ne me faites pas dire ce que je n’ai pas dit, ce n’est pas mensonger, certains éléments du livre présentent bien des similitudes avec un virus venu de Chine, mais le nœud de l’intrigue est ailleurs, et pour ma part, j’en ai été ravie!
Dans Les yeux des ténèbres, j’ai retrouvé avec bonheur la saveur des romans de Dean Koontz que je lisais adolescente alliée à des thèmes récurrents dans ses derniers livres. En tant que lectrice, j’ai adoré cette double strate : le plaisir régressif d’une atmosphère qui a bercé mes quatorze ans, et le décodage d’un topos chez l’auteur que je n’aurais jamais pu percevoir à l’époque. D’une part, nous avons, une fois de plus, des êtres aux prises avec une organisation obscure aux intentions discutables et à la morale encore plus contestable (Cela devrait rappeler des petites choses à celles et ceux qui ont lu Dark Web – hop avis de Clem ici-, La Chambre des murmures – mon avis ici, celui de Clem aussi– et l’Escalier du Diable –là). D’autre part, nous retrouvons aussi une part de surnaturel qui ne verse pas dans le récit d’horreur mais qui exploite juste ce qu’il faut d’irrationnel pour nous faire frémir… et pour faire frémir les personnages. C’est cet équilibre entre complot, enquête et surnaturel qui m’a le plus séduite. Cela crée un livre agréable, sans excès, la tension est bien présente et, même si nous comprenons plus vite que les personnages où l’auteur veut en venir, notre plaisir n’est pas entaché par un topos vain.
Le personnage de Christina Evans est vraiment attachant dans ce roman. Nous avons là une mère en souffrance, qui essaie de digérer un impossible deuil. C’est une femme forte et courageuse, une femme de talent, qui ne se laisse pas abattre et qui prend son envol après des années auprès d’un homme qui, finalement, ne la méritait pas. Désormais, elle est prête pour un nouveau départ, mais ce renouveau exige aussi des réponses et des certitudes. Christina sait écouter son intime conviction, et elle est le moteur du livre. Sans elle, l’édifice s’écroulerait, ce qui n’est pas sans rappeler la série Dark Web et Jane Hawk. Dans sa quête de vérité, elle trouve un allié en or, Elliot. Leur duo fonctionne à merveille. Je ne m’attarderai pas à savoir si le duo est crédible ou non, si des passages de romance sont excessifs (spoiler : oui), toujours est-il que ces questions restent à la marge et ne constituent pas le vrai enjeu de la lecture.
Le roman est porté par une dynamique parfaite : les rebondissements sont bien là, les pièges et les faux-semblants aussi. C’est finalement ce qu’on attend de lui. Nos protagonistes passent de proies traquées à chasseurs de main de maître et les rapports de force s’inversent à plusieurs reprises pour notre plus grand plaisir. Il n’y a aucun temps creux, et aucun passage n’est inutile. Bien entendu, les quelques pages de romance ne sont peut être pas essentiels, mais ils permettent d’étoffer un peu les personnages. Je n’y trouve rien à redire.
Ainsi, j’ai adoré et dévoré Les yeux des ténèbres. A partir du moment où nous le lisons indépendamment de la question d’un virus, nous pouvons savourer une intrigue délicatement ouvragée, avec une tension narrative constante et des thèmes annonciateurs du reste de l’oeuvre de l’auteur. Voici un très bon thriller, parfait pour se détendre et passer un très bon moment.