Dust, Sonja Delzongle.

J’ai lu plusieurs romans de Sonja Delzongle pas forcément dans l’ordre du reste… Quand la neige danse et Récidive. J’avais plutôt bien aimé ces deux romans, j’ai donc naturellement décidé d’exhumer Dust de ma pile à lire et de ma liseuse à l’occasion d’une sieste de mon fils dans mes bras.

Dust se déroule en Afrique. Des croix sanglantes sont retrouvées, faites de sang humain, deux années durant, un tueur insaisissable laisse ces traces de son terrible passage. Alors que Baxter est appelée en renfort pour tenter de l’arrêter, d’autres crimes surviennent. Une jeune femme albinos est tuée en pleine rue, certains de ses membres sont emportés pour être vendus à des trafiquants qui fabriquent des talismans. Deux enquêtes lourdes qui attendent d’être menées s’offrent à nos personnages.

J’ai apprécié de retrouver Hanah Baxter ici, ce qui est assez paradoxal comme formule puisque Dust est le premier volet de ses enquêtes. Nous la (re)découvrons avec toutes ses fêlures et ses contradictions : s’épuisant à la tâche, n’hésitant pas à user de substances illicites durant une enquête pour tenir au mépris de la faim et de la fatigue, impulsive, déterminée mais aussi prudente dans ses conclusions. Elle a des méthodes bien à elle, qui étonnent et détonnent mais qui fonctionnent. C’est une enquêtrice qui est humaine : elle hésite, tâtonne, se trompe, se laisse parfois berner et souvent elle est étreinte par un vague pressentiment qu’elle peine à identifier clairement. Il est donc agréable de la suivre, elle n’incarne pas la figure de l’enquêteur parfait et génial et cela fait beaucoup de bien. Alors, tout n’est sans doute pas très réaliste, mais somme toute, cela ne me gêne pas. Cela fonctionne bien, et son personnage confère une singularité certaine à ces polars. Elle est assez hors normes pour accrocher le lecteur.

L’enquête en elle-même est intéressante, à la fois captivante et désarçonnante. Nous apprenons à un tiers du livre suffisamment d’éléments sur le meurtrier pour croire que le plaisir du roman est gâché, que le reste va être fade et insipide. Or, il n’en est rien. Ce que nous apprenons est certes capital, mais nous permet seulement de resserrer le cercle des potentiels coupables, nous ne trouvons son identité exacte à aucun moment. Un flou perdure encore sur une très large partie du livre. A cela s’ajoute moults péripéties, mille et un petits riens qui viennent corser l’affaire et la rendre bien plus dense, bien plus résistante et plus complexe que nous ne le présagions. Une deuxième enquête surgit, les fils se croisent et s’entrecroisent. Bientôt, cela forme pour nous, comme pour les enquêteurs, une inextricable pelote. J’ai adoré la complexité avec laquelle les pièces du puzzle s’emboîtent finalement. Les ultimes rebondissements et la chute sont à la hauteur des craintes que j’ai eues. Sonja Delzongle crée un coupable aux multiples facettes toutes plus terrifiantes les unes que les autres ; les origines du mal trouvent de profondes racines dans le passé, un passé impossible à soupçonner au premier abord, aussi sulfureux que dérangeant. Par ailleurs, une fois que le lecteur arrive au bout des aveux du criminel, il a l’estomac au bord des lèvres : le projet, le procédé… tout est profondément révoltant. L’autrice a imaginé un projet aussi machiavélique qu’inhumain et en cela, c’est très efficace sur le lecteur qui reste absolument abasourdi.

Ainsi, l’intrigue est bien menée et nous sommes pris à revers. En cela le montage romanesque est très savoureux. Mais, car il y a un « mais », beaucoup de procédés d’écriture m’ont dérangée dans ce roman. J’en suis la première surprise car je n’avais pas souvenir de cela dans Quand la neige danse ou dans Récidive. Il y a dans Dust beaucoup trop de scènes de sexe à mon goût, réelles ou fantasmées, évoquées en terme très crus, s’asseyant parfois très confortablement sur la notion de consentement… Bref, des choses qui actuellement, ne passent pas bien pour moi. Ajoutons à cela une représentation de l’Afrique qui m’a mise mal à l’aise, que j’ai trouvée à la fois sinistre, caricaturale même si je ne doute pas que des choses horribles puissent s’y passer – comme ailleurs.

En conclusion, ce roman me laisse un goût amer : celui d’un style d’écriture qui m’a parfois rebuté, de propos chez des personnages qui m’ont profondément gênée et en même temps, une structure très efficace, un meurtrier absolument hors normes, monstrueux et terrifiant. Je ne saurais dire si je le conseillerais ou non… à vous de vous faire un avis, je reste mi figue, mi raisin.

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