Requiem des ombres, David Ruiz Martin.

Je découvre David Ruiz Martin avec ce roman, que j’ai lu il y a quelques semaines. Ce thriller m’a beaucoup intriguée par sa couverture et par son synopsis. Je ne savais pas vraiment à quoi m’attendre alors je me suis laissée porter par la plume de l’auteur, et me suis perdue dans les ombres.

Ce roman met en scène Donovan Lorrence, un auteur à succès qui est hanté par la disparition de son frère lorsqu’ils étaient enfant. Il choisit de revenir sur les traces de son passé pour essayer d’élucider les choses et pour apaiser enfin ses tourments. S’il butte sur de nombreuses choses, il rencontrera aussi une femme aux talents étranges. Mais remuer le passé n’est pas sans conséquence…

Le personnage de Donovan est une des clef de voûte du roman. C’est un homme entre deux âges, torturé par son passé, qui noie son chagrin et sa culpabilité du survivant dans moults excès. Il a relativement peu de filtres et a autant de délicatesse qu’un éléphant dans un magasin de porcelaine tant il est déterminé à comprendre. Son attitude confine à l’agressivité avec celles et ceux qui entravent sa quête de vérité selon lui. Son enquête est bien entendu légitime et nous comprenons qu’il veuille donner du sens à tout cela. Pour autant, sa manière de faire déconcerte et je reconnais que le début du roman m’a laissée mi-figue mi -raisin. Certains éléments m’ont passionnée et j’ai eu envie d’avancer et d’autres éléments ont freiné ma lecture et m’ont presque découragée. Le tempo n’est pas enlevé, bien au contraire, nous sentons une vraie pesanteur, le poids du passé qui freine, qui ralentit. Nous suivons Donovan et comme lui, nous nous heurtons à tout : la peur de la vérité, les obstacles dressés par les autres. A cela s’ajoutent les atermoiements embrumés d’alcool de Donovan, les fausses pistes et les culs-de-sac. Ce début de roman est donc étrange, à mi-chemin entre mystère opaque et fascinant et lenteur propre à décourager le lecteur.

L’apparition d’un personnage féminin hors norme, Iris, redynamise l’ensemble : par son comportement étrange, par ses phrases sibyllines, elle attise la curiosité, elle nous donne envie d’en savoir plus, de découvrir qui elle est vraiment, ce qu’elle fait, elle nous donne envie de savoir si elle est réellement un allié ou si elle est un ennemi déguisé sous des dehors affriolants. Ce personnage est la touche originale du thriller : cela lui donne une aura singulière que je n’ai pas trouvée ailleurs. C’est un petit vent ésotérique qui balaye l’intrigue, sans pour autant la faire basculer pleinement dans le fantastique ; une touche qui rend le roman savoureux et m’a donné très envie d’aller plus avant.

D’une manière générale, j’ai beaucoup aimé les révélations. La chute était pour moi inattendue tant au niveau des éléments du passé que du présent. La résolution autour du personnage féminin ne m’a peut être pas follement passionnée, mais j’ai beaucoup aimé l’explication donnée aux mésaventures du frère disparu. J’ai particulièrement aimé la complexité de ce drame du passé : les choses ne sont pas manichéennes, on ressent la complexité liée à l’humain. Le coupable n’est pas juste un monstre, ceux qui ont contribué à ce que le mystère perdure avaient leurs raisons- pas forcément légitimes du point de vue de la morale, mais tissées des contradictions propres à l’humain. Le noyau dur du drame est donc véritablement intéressant et évite toute facilité d’écriture.

L’auteur signe donc ici un thriller très intéressant, un peu hors normes, nourri d’une belle matière humaine. Nous sentons les émotions des personnages affleurer, se percuter, entraînant moults rebondissements par peur, par perte de patience, par manque de tempérance. Il y a là un matériau puissant, des révélations étonnantes et bien amenées- à même de déstabiliser et de cueillir un lecteur qui ne s’y attendait pas. Pour autant, la rythmique du récit ne m’a pas toujours emballée. Je vous laisse le plaisir de découvrir à votre tour et de vous forger votre propre avis.

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