Brocélia, Jean-Marc Dhainaut.

Le résumé de Brocélia m’a convaincue de me laisser tenter et de découvrir par la même occasion, un nouvel auteur. Le titre est évocateur, avant toute chose, et fait écho – à juste titre- à la forêt de Brocéliande, faisant carburer notre imaginaire et créant un horizon d’attente qui n’est pas déçu!

Brocélia met en scène Meghan Grayford, une journaliste passionnée par l’exploration de lieux abandonnés. Par hasard, elle a localisé un manoir abandonné par ses propriétaires à la va-vite. En y pénétrant, elle ignore encore que c’est le sang et les larmes qui ont coulé entre ces murs, et non les rires et la magie des fées. Et la nuit, les murs se souviennent, le manoir se réveille, le passé revient à la vie, or Meghan est un peu trop curieuse pour son propre bien.

Lorsque j’ai commencé ma lecture, je n’ai pas relu la 4e de couverture, dès les premières pages, l’identité du récit est très clair. C’est vraiment appréciable car le lecteur sait où il va et peut savourer pleinement ce que l’auteur lui propose. J’ai adoré l’atmosphère sombre, un peu malsaine- il faut le dire-, légèrement poisseuse par moments- qui transpire à travers les pages. Le domaine de Brocélia exerce un charme rare sur Meghan et sur le lecteur, une sorte d’attraction- répulsion, qui nous poursuit, nous travaille et nous subjugue autant qu’il nous révulse. Nous avons envie de dire à Meghan de fuir, de ne pas y retourner, mais nous sommes ravis qu’elle s’y rende, qu’elle explore car nous avons soif de comprendre. J’ai aimé la complexité de l’histoire de la demeure : les siècles s’entrecroisent en une sanglante suite, laissant un champ de possibles presque infini pour la chute. La magie – blanche et noire -, la cupidité et la rancœur des hommes, les esprits et les fées, les changelins et toutes les légendes de la forêt de Brocéliande se tissent ici en un maillage complexe qui pique notre curiosité, qui nous fascine et nous emporte toujours plus avant. Tout cela fait de Brocélia une lecture qui passionne et se dévore. Bien qu’ayant peu de temps pour lire avec mon bébé, c’est un des romans que j’ai lus le plus vite tant l’intrigue m’a emportée.

Un autre point se dessine donc ici : la plume de l’auteur est très fluide. Nous sommes vraiment pris dans un tourbillon effréné de rebondissements, de révélations, d’histoires à faire frémir. Nous sommes accrochés par des détails que nous rêvons d’élucider, nous cherchons à démêler le vrai du faux, le rêve de la réalité, et – comme dans tout récit fantastique – des petits riens nous font croire à l’incroyable.

La description du domaine de Brocélia est une vraie réussite. La demeure sort d’entre les arbres sous nos yeux, ses habitants passés et présents se relèvent et s’animent devant nous, les mystères qui font sa triste renommée nous sont peu à peu dévoilés. L’auteur a un talent rare pour entretenir des doutes malaisants, pour laisser des interrogations qui nous titillent l’esprit et qui éclatent en bouche avec une saveur inégalée lorsque la bonne pièce du puzzle apparaît et trouve sa place.

J’ai beaucoup aimé le personnage de Meghan ainsi que celui de son meilleur ami. Elle, téméraire au delà du raisonnable, elle dont l’identité fait écho à des personnages du passé ; lui un peu plus craintif, mais d’une fiabilité et d’un soutien à toute épreuve. D’une façon générale, Meghan sait s’entourer de personnes généreuses, des personnages qui font chaud au cœur et que Jean- Marc Dhainaud arrive à parfaitement faire exister. A travers les lignes, les alliés de Meghan respirent la chaleur humaine. Bien évidemment, si en pinaillant un peu, je pourrais dire que Meghan est parfois un peu trop téméraire pour être parfaitement crédible, mais finalement, peut-être ne sommes nous pas toujours vraiment raisonnables non plus. Cela ne m’a donc absolument pas dérangée.

Ainsi, j’ai adoré ma lecture : le cadre, l’alliance du passé et du présent, la suite de drames qui a peu à peu tissé la légende terrible des lieux, la résurgence du passé, les personnages dont le vrai visage se révèle peu à peu, les mystères enfouis et mis au jour patiemment, tout concourt à une lecture passionnante, fluide qui nous fait oublier le temps et qui nous renvoie à la magie et aux fantômes qui nous faisaient trembler et rêver enfant. Un véritable régal. Je replongerai dès que possible dans la prose de Jean-Marc Dhainaut, et avec grand plaisir.

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