Le Plongeon, Séverine Vidal et Victor L. Pinel.

J’ai reçu Le Plongeon dans le cadre d’une masse critique privilégiée de Babelio que je remercie. Cette bande dessinée évoque le destin d’une vieille femme, devenue veuve, et très âgée, elle prend la décision d’aller vivre dans un EHPAD, de vendre sa maison et de quitter son univers.

La bande dessinée porte bien son nom car pour notre mamie, il s’agit non seulement d’un plongeon dans l’inconnu mais aussi d’un plongeon dans la vieillesse, la vraie, celle d’où on ne sort plus. Dans l’EHPAD qu’elle intègre, on la traite comme une adolescente : les petites fêtes sont interdites, le rythme doit être régulier, les ateliers auxquels elle doit participer sont parfois étranges et infantilisants, et les pensionnaires sont soit sympathiques soit déprimants. De femme indépendante qui vivait chez elle, elle devient le témoin de l’usure du temps qui abîme les autres, mais aussi elle-même. Finalement, les autres personnes âgées deviennent son reflet et elle voit chez les autres ce qui lui arrivera peut-être. Dans ce face à face avec la fin, dans cette course contre la montre, elle nouera de solides amitiés pour se sentir libre, encore, et vivante, définitivement. Notre héroïne endosse donc le rôle de mamie terrible dans l’EHPAD, celle qui ne rentre pas dans le moule, celle qui n’a pas renoncé à être qui elle veut, celle qui veut croire en un demain riant fait de belles choses. Et, par cette posture, des situations cocasses arrivent et permettent de faire affleurer le rire dans des situations au fond assez tragiques. Cette bulle de gaieté est un régal au sein d’une œuvre malgré tout assez triste.

Mais le quotidien est aussi rythmé par les visites de ses proches, des visites cruellement attendues, des visites qui prennent une importance capitale parce que justement, elle n’a plus rien en propre dans ce lieu où on partage tout et où l’intimité se résume à une chambre personnelle. Cela permet de mettre en lumière une réalité des ces lieux : finalement, une visite peut faire cristalliser les espoirs d’une semaine entière lorsque l’on est dépossédé de tout le reste.

Les graphismes de cette bande dessinée servent le propos : ils en dévoilent autant que le texte et montrent la détresse, la solitude, l’impression de se perdre et le constat amer de l’âge qui prend le dessus. C’est un regard sans concession sur la vieillesse, mais un regard tendre et émouvant. Une mamie accompagne son mari à l’EHPAD parce qu’elle ne peut plus gérer seule ses frasques de petit vieux, et la culpabilité qu’elle ressent est palpable ; le besoin des pensionnaires de se recréer un cocon est lui aussi très net. Finalement, le dessin nous montre une bande de petits vieux, prêts à faire les quatre cent coups, au crépuscule de leur vie, sans idéaliser ni les lieux, ni les ressentis. C’est une bande dessinée qui touche parce qu’on a toutes et tous un papy ou une mamie que nous avons vu faiblir avec les ans, et, parfois, qui a eu besoin d’être accompagné. L’œuvre nous parle donc d’humanité et de partage.

Ainsi, Le Plongeon est une lecture émouvante. Avec beaucoup de sensibilité, nous suivons l’héroïne dans une nouvelle étape de sa vie, et sans doute pas la plus simple. En quelques pages, nous rions avec elle des plaisanteries qu’elle ose, nous pleurons aussi sur sa détresse et nous applaudissons à deux mains sa soif de vivre. Une très jolie BD, vibrante d’humanité.

2 réponses sur « Le Plongeon, Séverine Vidal et Victor L. Pinel. »

  1. Merci pour ce petit résumé. C’est amusant, je viens de lire un avis plutôt mitigé sur cette BD. Cela m’interesserait de le lire.
    J’ai été animateur en Ehpad pendant trois mois donc ça m’interesse 🙂
    Bonne soirée

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    1. Merci pour votre message, oui, je pense que c’est une BD qui ne laisse pas indifférent et qui peut bien ne pas plaire. Je serai curieuse de savoir ce que vous en avez pensé, justement parce que vous aurez un oeil différent du mien lors de votre lecture! Bonne soirée à vous.

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