La Voie des Oracles, T1 Thya. Estelle Faye.

Ce premier tome de La Voie des Oracles m’a été offert par mon amie Mylène. Je ne connaissais pas du tout, et je la remercie pour le partage et pour l’adorable dédicace. J’intègre cette lecture au Pumpkin Autumn Challenge – forcément, j’avais très envie de dévorer le roman- ce sera pour la catégorie A window to the past, du menu Automne Douceur de vivre.

Le récit se déroule en Gaule, au Ve siècle après Jésus-Christ. L’Empire romain devenu chrétien depuis peu décline, cerné par les barbares et miné par les luttes intestines. Thya, la fille d’un illustre général est une Oracle, mais c’est un statut bien difficile en ces temps troublés et il lui faut se cacher tant les vieilles croyances déchaînent passions et violences. Lorsque le père de Thya est victime d’une embuscade commanditée par son propre fils, le temps des choix arrive. Le Destin s’ouvre devant les pas de Thya, qui, au gré de ses aventures, en apprend plus sur elle-même, sur sa famille et sur la vraie Histoire.

Ce qui m’a frappée dès les premières pages et jusqu’au bout de ma lecture, c’est la beauté et la fluidité de la plume de l’autrice. Les descriptions sont belles et douces, elles ont un charme évocateur puissant. C’est une sensation assez étrange et tout à fait agréable. « Envoûtant », m’a dit Mylène quand nous en avons parlé, et je crois qu’elle a le mot juste, « envoûtant ». Malgré le contexte anxiogène de ces derniers temps (re-confinement, pandémie… vous voyez de quoi je parle), j’ai passé un moment hors du temps, dans une bulle apaisante et réparatrice, dans un univers chatoyant et terrible, à la beauté surnaturelle. Un immense merci donc pour ce beau roman et cette magnifique découverte, Mylène.

J’ai adoré l’entrelac constant entre Monde ancien et Monde chrétien. Entre ces pages, deux conceptions du monde coexistent, s’affrontent, s’entrechoquent constamment. Les anciens dieux s’affaiblissent et, en luttant pour leur survie, luttent pour protéger l’Oracle ; les hommes d’Eglises luttent contre le monde païen, sans même connaître tous les enjeux ; et, prise en étau entre ces deux mondes qui la dépassent, surgit une frêle jeune fille. Thya. Une jeune fille déterminée et naïve, puissante et fragile, infiniment gentille et déterminée. Une jeune fille toute de paradoxe tissée dont nous suivons l’initiation au monde. D’aventure en aventure, elle découvre le monde qui lui a été caché, elle se défait de sa vision des choses manichéennes. Elle apprend que la loyauté et le devoir sont plus complexes que ce que son père disait, elle apprend qui était vraiment ce père et la statue d’airain qu’elle a érigée en son cœur durant toute son enfance se fissure et se remodèle pour faire surgir l’homme sous le héros, l’homme avec ses faiblesses et ses erreurs. Nous avons le récit d’une femme qui s’affranchit, qui se libère de ses entraves et qui déploie ses ailes. De l’enfant protégée surgit la femme forte… voilà qui nous réserve bien des surprises dans les autres tomes, j’en suis convaincue! Inutile de vous dire que j’ai une affection très marquée pour notre douce Thya.

Les personnages qui jalonnent le parcours de Thya sont tout aussi importants. Le serpent qu’est Aedon m’a insupportée dès ses premières apparitions. Sa sournoiserie et sa duplicité transpirent de toutes les pages qui lui sont consacrées, et pourtant, il n’est pas le personnage le plus présent. Il y a là un vrai travail pour faire cristalliser le Mauvais, le Laid par touches puissantes. Enoch est quant à lui un vrai bonheur à rencontrer. J’ai été conquise par son espièglerie, par son humour, par son courage aussi. J’ai particulièrement aimé qu’Estelle Faye n’en fasse pas un fier à bras, ou un homme sans failles. Enoch est torturé, il souffre, et lui aussi grandit au fil des aventures. En réalité, nous avons deux quêtes initiatiques dans ce livre : celle de Thya, et en trame de fond celle d’Enoch. Et je parie qu’il y a encore beaucoup à découvrir sur lui! Cela me ravit d’avance.

La rythmique du récit est à mon sens parfaite. Nous avons des aventures trépidantes, des renversements de situation inattendus, de la magie, des interventions surnaturelles, des secrets révélés, des trahisons. L’autrice mêle avec brio considérations politiques, remords et loyauté, sens du devoir et mystère, car finalement, Thya ignore pour quelle raison précise elle se sent poussée vers Brog. Tout cela permet de maintenir le suspense et d’insuffler au texte la dose parfaite entre aventures et stratégie, nous amenant nous aussi à nous interroger sur la véracité des liens entre les personnages et sur leur solidité, guettant les trahisons et les petites lâchetés.

La Voie des Oracles, Thya, est donc un roman que j’ai adoré. C’est un petit bijou de fantasy, tendre et équilibré, trépidant et passionnant. Avec un charme puissant, la plume d’Estelle Faye nous emporte dans un autre monde, ouvre des failles sur des temps immémoriaux et renoue le lien entre magie des temps anciens et découverte de soi. Une pépite.

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