Les oiseaux rares, Hugo Paviot.

Les oiseaux rares par Paviot     J’ai reçu ce roman dans le cadre d’une masse critique Babelio et des éditions Seuil que je remercie au passage.

    Les Oiseaux rares évoque plusieurs destins: celui d’Achir qui aimerait se construire une vie meilleure quitte à partir de son Algérie natale, celui d’Hélène, professeur de français dans un micro-lycée à Vitry, celui de Zapata, un vieux monsieur haut en couleurs qui habite dans la même résidence de vie que Sihem, jeune fille en décrochage sur le point d’intégrer le micro-lycée.

      Je me suis lancée dans cette lecture au petit bonheur la chance, en me disant que cela donnerait une bouffée d’oxygène à ma pile à lire, et comme toujours une petite appréhension m’a étreinte. Pourtant, après vingt pages, je savais que ce livre allait me plaire. Très vite, je me suis laissée séduire par ces êtres cabossés par la vie, malmenés, écorchés vifs, qui chacun à sa manière tente de survivre à ce qui le blesse. Achir et ses rêves d’ailleurs, de renouveau, de vie meilleure, Sihem et sa fracture avec l’école mais aussi avec une société qui ne l’accepte pas, Zapata en constante représentation pour mieux se cacher, Rose et Hélène, les fourmis, les travailleuses acharnées, dévouées aux Autres, mais qui masquent aussi leurs faiblesses. Les personnages ici sont émouvants, plus ils se dévoilent et plus ils gagnent en épaisseur. Leur destin est malheureusement crédible,  à mon sens du moins, leurs failles et leurs souffrances peuvent trouver écho en nous, d’autant que l’écriture ne bascule pas dans le misérabilisme ou le pathos. Les choses sont dites, mais sans apitoiement excessif.

       J’ai eu un coup de cœur pour Sihem et pour Zapata. Sihem promène ses plaies béantes dans sa banlieue et, plutôt que de les panser, elle rue dans les brancards, et pleure, seule, sur sa solitude. Elle est un animal sauvage, effarouché par la cruauté de la vie, par les souffrances du monde, que l’on ne pourra apprivoiser que peu à peu. C’est ce que Zapata parvient à faire, à sa manière, c’est ce qu’Hélène fait aussi, différemment. Au fil de ces rencontres, avec ces nouvelles béquilles – qu’il faut d’abord accepter- Sihem avance, progresse et met à jour celle qu’elle peut être, celle qu’elle veut être. Par le détour des Autres, elle apprend à devenir elle-même. C’est un cheminement long et difficile, fait de rechutes et de redémarrages, mais c’est un parcours que nous traversons tous – chacun à notre échelle. Zapata est un vieil homme très touchant, j’ai aimé la relation qu’il noue avec la jeune femme. De deux êtres abîmés par la vie naît une relation douce et tendre, Sihem se trouve un grand-père et Zapata se trouve une petite-fille. Leur complicité sera source de petits bonheurs et de grandes étincelles, de celles qui nous réchauffent le cœur mais qui nous arrachent aussi les entrailles. Alors, certains diront que ce n’est pas réaliste, peut-être, mais je suis convaincue que quelque part, il y a bien un Zapata et une Sihem qui se trouvent, et je préfère croire qu’il n’est pas si rare que ça que deux souffrances s’apprivoisent pour guérir ensemble, à leur façon.

     Finalement, dans ce livre, chaque personnage est un oiseau rare : chacun est  intéressant et touchant par ses failles. D’ailleurs, nous sommes tous des oiseaux rares, et c’est peut-être là ce qu’il faut retenir. Nous ne ressemblons à aucun autre, c’est ce qui nous rend rare et précieux.

      Ainsi, Les Oiseaux rares nous offre une histoire douce et tendre, parfois douloureuse, mais in fine lumineuse. C’est une histoire de partage et d’humanité, sous-tendue par l’espoir, le renouveau et le pardon.

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