Les Limbes, Olivier Bal.

Couverture Les limbes      Cet été, j’ai enfin fait sortir Les Limbes d’Olivier Bal de ma PAL. Ce roman m’a longtemps fait de l’œil, et comme ma mère m’a offert Le Maître des Limbes suite à Lire à Limoges, je ne pouvais plus le laisser ainsi en souffrance dans ma bibliothèque.

      Le résumé est singulier. Tout débute durant la guerre du Vietnam, en 1970. Un jeune soldat est blessé, un mois de coma plus tard, il se réveille et semble doté d’étranges capacités : il peut visiter les rêves des autres et influer dessus. Du cauchemar des nuits sans sommeil, hantées, au projet Limbes de la CIA, il n’y a qu’un pas. Et s’ils ouvraient la boîte de Pandore avec leur projet?

      Pour être très honnête, ce thriller m’a fait sortir de ma zone de confort : la CIA, les guerres, l’espionnage et le top secret… ce ne sont pas vraiment mes thèmes de prédilection. Mais l’engouement autour de ce roman a fait son chemin et je me suis dit que je ne perdais rien à essayer. Force est de constater que l’entrée dans le roman a été difficile à cause de ces thèmes justement, mais aussi parce que j’ai eu un peu de mal à voir où cela allait me mener, au début. La première partie du récit est assez lente et pose le contexte. En réalité, elle est tout à fait crédible car, par son rythme, elle mime le retour à la vie de James et sa lente prise de conscience, oscillant entre déni, rejet et acceptation. Il est donc parfaitement logique d’avoir des zones d’ombres, des incertitudes et une certaine pesanteur. Le rythme devient plus dense avec l’ouverture du projet Limbes et s’accélère jusqu’à atteindre LE point critique. En réalité, aux deux-tiers de l’oeuvre, la tension ne redescend plus et nous maintient, nous et les personnages, dans une grande fébrilité. J’ai adoré cette montée en puissance qui fait la saveur de l’oeuvre, le surnaturel n’apparaît d’ailleurs que dans le dernier tiers du roman, mais quelle irruption! Voilà de quoi déranger, ébranler le lecteur et lui donner quelques frissons. Le surnaturel ajoute une part d’originalité à ce roman, et c’est ce qui m’a séduite. Nous sortons des sentiers battus et renouons avec des films modernes comme Inception. L’oeuvre se nourrit de vos références littéraires et artistiques.

      En effet, le roman repose sur le postulat qu’un monde du rêve existerait, que certains seraient capables de prendre le contrôle des rêves et du corps d’autrui. Il prend appui sur les croyances de nombreux peuples dont les mayas. A travers le professeur Kleiner, beaucoup d’explications nous sont données sur les légendes, sur Tjukurrpa, sur les Élus ou Éveillés… Tout ceci permet de donner consistance au projet et d’inscrire la thématique du livre dans une historicité. Cela lui donne corps et assoit finalement les découvertes et les aventures des personnages. Je n’ai donc pas été étonnée ou dérangée par les événements. L’ensemble est parfaitement amené, préparé pour que nous ne rejetions ni découvertes, ni rebondissements.

     De plus, ces idées sont servies par un univers très élaboré, précis et fin. La description de la Nef, des Terres Mortes, de la Créature sont particulièrement détaillées et permettent de visualiser les lieux. C’est une des grandes forces de ce thriller : nous avons une plume très visuelle, très cinématographique. Nul besoin de recourir à une image, nous voyons à travers les mots. C’est d’ailleurs une des choses qui m’a frappée au début de ma lecture. Alors que je peinais sur la thématique du combat au Vietnam, j’ai été interpellée par la poésie de la langue, des rythmes et des sonorités alors même que l’on évoquait les combats. De par ma formation littéraire, je suis sensible à ces effets sonores et j’en ai été enchantée.

      Les personnages ont le mérite d’être cohérents. James passe du rejet à l’exploration frénétique, heureux de se sentir différent, puissant, et cela colle à sa personnalité. J’ai aimé Nate, bourru et protecteur. Le professeur Kleiner est également intéressant. Figure de savant fou et génial, il est fasciné par son projet qui devient sa marotte, au point d’en oublier toute contenance et toute mesure. Cela correspond à l’oeuvre d’une vie et, dans son projet démiurgique, il rejoint le docteur Frankenstein, donnant ou redonnant naissance à un monstre qui le dépasse. Ce professeur est ambivalent et pique la curiosité.

       Ainsi, Les Limbes est une très belle découverte. Pour moi, c’est un ovni dans le champ du thriller. Il mêle avec bonheur Histoire, espionnage, fantastique, armée… tout en amenant une touche de modernité. Et la résistance du texte en fait aussi sa saveur : il faut prendre le temps de laisser les pages dévoiler leurs secrets puis d’explorer les confins de cet univers atypique.

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