Le Chant du Coucou, Frances Hardinge.

Le chant du coucou par Hardinge      Bon, soyons honnête : je mourais d’envie de lire ce roman depuis sa sortie, la couverture à glacer le sang et le titre poétique m’avaient séduite au premier regard… Et puis des événements imprévus ont différé la lecture… Même si ce n’était pas prévu je vais l’intégrer au Pumpkin Autumn Challenge, pour Cristaux, tarot et encens… pour une peccadille: je n’aime pas l’idée de rester à 13 livres lus, oui, c’est bête mais ça me turlupine…

      Le Chant du coucou porte bien son nom. Comme l’oiseau le fait, une étrange coucou, une petite fille, a pris la place de Triss dans son foyer, sans que personne hormis sa sœur ne semble s’en apercevoir. Mais cette Triss commet des bévues et attire l’attention. Bientôt, sa véritable nature l’emporte et une folle cavalcade s’engage. Où est la vraie Triss? Qu’entend faire notre coucou et pourquoi est-il là? Ce sera à vous de le découvrir!

      En toute objectivité, bien que quasiment conquise d’avance, j’ai eu du mal à entrer dans l’histoire. Au début, je me perdais dans les querelles entre Pen, la sœur cadette, et Triss, je peinais à trouver l’époque à laquelle se déroulait le récit, et les choses avançaient peu. Les premières pages ont donc été particulièrement frustrantes! Et les soupçons de surnaturels parsemés ne m’aidaient pas à trouver mon équilibre dans l’oeuvre.

     Et puis, je ne saurais dire à quel moment précisément, mais il y a eu un déclic. Une fois le décor posé et l’ensemble des pions avancés sur l’échiquier, l’histoire s’est accélérée. Notre Triss-Coucou a subi des revers, sa vraie nature s’est peu à peu dévoilée et le jeu du chat et de la souris avec sa sœur est devenu savoureux. La détresse de l’enfant qui croit perdre la raison a aussi été très touchant. A partir de là, je peux dire sans mentir, que j’ai été happée dans l’histoire.

      L’autrice a créé des personnages étonnants, l’Architecte est un mélange inquiétant de démon, de double et de magicien, semblant œuvrer dans l’ombre à des projets machiavéliques, ne supportant ni ennemi ni contrariété. En cela je trouve la réactivation du topos du pacte avec le démon intéressante. Nous sortons des sentiers battus et nous trouvons un personnage très original, fouillé et intriguant.

      J’ai pris beaucoup de plaisir également à découvrir Pen, figure de peste détestable… peut-être pas si détestable que cela au fond, car sous l’enfant gâtée et colérique se cache une souffrance sans fond dont je vous laisse trouver les raisons. Violet est aussi une figure féminine assez exceptionnelle. Parfaite antithèse à la mère des filles, femme forte, femme libérée, à l’attitude réprouvée, elle est l’image même des préjugés et des faux semblants, car finalement, celui qui est prompt à condamner ne connaît pas forcément tant de choses que cela sur sa victime.

      La Fausse  Triss, notre Coucou, est aussi particulièrement intéressante : à la fois monstre, bourreau et victime, elle est une marionnette aux mains de personnes mal intentionnées. Et finalement, sa quête de vie et d’humanité va sous-tendre l’oeuvre, tout autant que la recherche désespérée de la vraie Triss. J’ai adoré cette figure qui permet de s’interroger sur le statut du monstre : qu’est-ce qu’un monstre? Ce qui est hors norme? Ce qui est contraire aux normes habituelles de la nature? Est-ce seulement les actes qui conditionnent la monstruosité? Et si le monstre était plus humain que des hommes pensant faire le bien? Bref, voici un texte riche en humanité qui nous invite à réfléchir, l’air de rien.

      Enfin, l’univers imaginé par Frances Hardinge est d’une précision glaçante : les ciseaux et le coucou, les Adjacents, l’Architecte, Pie-Grièche et tous les autres forment une communauté de Petit Peuple bigarré, bizarre, inquiétant et le passage entre les mondes est digne d’un dessin d’Escher. De quoi vous faire tourner la tête et vous entraîner dans un Ailleurs, beau par son étrangeté et terrible par ses réalités! C’est donc une réelle réussite, un petit bonheur de lire cette langue poétique et douce qui parvient à faire surgir un univers entier par la force évocatrice des mots. Plus d’une fois, j’ai relu une description en me disant que telle ou telle formule était réellement belle, pas efficace ou précise, mais belle. Alors bien sûr, quelques expressions m’ont surprise, mais ce n’est pas ce qui m’est resté en tête lorsque j’ai fermé le roman, repue et contente.

      Ainsi, j’ai adoré Le Chant du Coucou : ce que je conserve de ce texte, c’est la beauté de la plume, la profondeur des personnages et la cavalcade enlevée et rythmée qui m’a emportée bien loin de la grisaille automnale. 

2 réponses sur « Le Chant du Coucou, Frances Hardinge. »

    1. Oh non! Il ne faut pas. Je pense que c’est surtout parce que je m’attendais à un rythme enlevé dès le début ( va savoir pourquoi!) et du coup, ça a déçu mon attente, mais quand on sait que l’intrigue démarre doucement, je suis convaincue que ça n’a pas le même effet. 🙂 Le reste de l’histoire est vraiment chouette. Je serai ravie d’avoir ton retour après lecture, par contre, histoire de confirmer ou d’infirmer cette hypothèse!!

      J’aime

Laisser un commentaire