J’avais beaucoup aimé le premier volet des enquêtes de la commissaire Vanina Guarrasi Sable noir, alors je n’ai pas hésité une seconde quand j’ai vu qu’une deuxième enquête était parue. Pour autant, j’ai un peu tardé à la lire après son arrivée dans ma pile à lire : emporté à la maternité le jour de mon accouchement (quelle idée! J’ai sérieusement cru que je pourrais lire…), ce roman a sagement attendu que les nuits soient un peu plus reposantes pour être lu dans de bonnes conditions.
Dans cette enquête, les apparences peuvent s’avérer trompeuses, les indices doivent être examinés avec circonspection. Sur une île où plane toujours l’ombre de la mafia, de la corruption, Vanina Guarrasi sait être patiente. Elle fait face à une enquête étonnante : des jeunes voient un homme se débarrasser d’une valise, une femme appelle de manière anonyme pour signaler un meurtre, dans une maison en bord de mer occupée par Lorenza Iannino. Du sang, un corps introuvable et un mystère opaque à lever.
Une fois de plus, j’ai aimé la complexité de cette enquête. Dans les romans de Cristina Cassar Scalia, rien n’est simple, rien n’est aisé, tout s’entremêle : le passé éclaire le présent même s’il ne l’explique pas, lorsqu’on gratte le vernis des apparences, nous nous apercevons que personne n’est vraiment ce qu’il veut bien laisser croire, les chausses- trappes sont légion, de la petite omission aux turpitudes les plus révoltantes.
Dans ce roman, nous trouvons une galerie de personnages foisonnants : les nantis, fiers de leurs privilèges, qui pensent pouvoir jouer avec la Justice et le système, les parvenus qui essaient de tirer leur épingle du jeu sur un échiquier composé de requins, les ombres du passé qui ressurgissent, les innocents qui, en réalité, cachent de lourds secrets et les agents doubles. Le tout est de savoir qui est qui, qui est honnête, qui cache un lourd secret, qui œuvre, tapi dans l’ombre, pour mettre à terre son adversaire. J’ai particulièrement aimé cette dynamique travaillée, exigeante aussi à la lecture. Cela vient refléter la complexité de la nature humaine. La victime, poussée par le désespoir et la souffrance, peut devenir bourreau ; l’instigateur du complot peut être motivé par des raisons louables, le détestable personnage arrogant, abusant sans cesse de son influence, peut lui aussi devenir victime. L’ensemble crée un roman foisonnant où d’indice en indice, les cartes semblent plus embrouillées avant de finalement s’éclairer lorsque les éléments cruciaux sont mis en évidence et agencés de façon à faire sens. La lecture prend donc du temps, l’enquête prend du temps, piétine, prend des chemins de traverse, revient sur ses pas… et justement, c’est un cheminement qui me plaît. Ici, pas d’enquêteur super-héros mais des hommes et des femmes qui réfléchissent, analysent et se fient aussi à leurs intuitions.
Je mentirais si je disais que tout m’a surpris. Il y a une révélation que j’ai vue venir bien longtemps avant d’en avoir la confirmation, mais dans l’ensemble, la deuxième moitié du roman m’a réservé de très belles surprises, des rebondissements inattendus, aussi révoltants que finement exécutés.
Il s’agit ici d’une traduction, il est donc difficile de qualifier la plume de l’autrice, mais le roman est fluide et se lit bien une fois que nous avons mémorisé tous les personnages. Il n’y a ni temps mort inutile ni hâte préjudiciable.
Enfin, j’aime toujours autant le personnage de Vanina : entière, courageuse, opiniâtre, elle ne se laisse pas intimider, elle oriente son enquête au mieux, s’appuie sur une équipe dont elle connaît les forces et sait se faire aider et entourer des bonnes personnes. Je suis très sensible au lien qui l’unit au commissaire retraité Patané et à son collègue Spano. Une réelle complicité innerve les pages, fait sourire, amuse et détend l’atmosphère. Cela confère juste ce qu’il faut d’humanité au personnage, sans mièvrerie. L’équilibre entre l’enquête et la vie personnelle de la commissaire est parfait.
Ainsi, je ne regrette pas ma lecture. J’ai été ravie de retrouver Vanina, un personnage que j’apprécie dans une enquête inédite, originale et prenante. Les multiples ramifications et les secrets mis au jour entretiennent tension et suspense. Je n’ai pas boudé mon plaisir et je lirai avec bonheur les romans à venir !
Les Rêveries d'Isis 