Ce troisième tome, je l’attendais avec impatience, je n’ai donc pas boudé mon plaisir dès que j’ai pu sereinement entamer cette nouvelle enquête. J’ai mis un peu de temps, mais je ne regrette pas d’avoir attendu d’avoir l’énergie et la disponibilité d’esprit pour ne pas passer à côté.
Washington Poe et Tilly sont ici confrontés à une enquête étonnante : des morceaux humains, déposés dans des endroits insolites, des symboles cryptiques laissés à côté, des crimes qui ne semblent avoir aucun lien… et pourtant!
J’ai adoré cette enquête trépidante. L’auteur insuffle du rythme à son récit, mais sans basculer vers le grand spectacle, cela donne une temporalité crédible qui plonge le lecteur au sein de l’équipe d’enquêteurs : comme eux, nous nous interrogeons, nous rongeons notre frein, nous nous étonnons, nous écumons de rage à voir l’enquête piétiner, et, soudain, nous nous lançons à leurs côtés dans une course effreinée, nous craignons qu’il ne soit trop tard, nous sommes éberlués par l’issue. La complexité de l’enquête ajoute une saveur indéniable au récit : nous sortons du cadre, nous relions les points avec des crimes commis à l’étranger, nous spéculons et finalement, le mobile était trivial, banal mais terriblement redoutable. Quels méandres empruntés par le criminel pour brouiller les pistes, pour nous faire croire au mauvais hasard, pour détourner notre attention ! J’ai savouré chacune des pages dans la deuxième moitié du récit, car chacune apporte sa pierre à l’édifice, chacune nous amène vers la funeste issue. J’ai certes pressenti certains éléments de la révélation, mais force est de reconnaître que l’auteur maîtrise l’art subtil de faire passer un indice clef pour une précision anecdotique. Le bonheur de lire s’en trouve considérablement accru.
Inutile de dire que je suis totalement séduite par le duo Bradshaw / Poe. Notre ours grognon qui ne rêve que de se terrer dans sa bergerie se fait plus d’une fois secouer par cette jeune fille qui s’affranchit totalement des conventions sociales – faute de les comprendre et de les appliquer- et qui le materne comme un tout petit à la moindre occasion, tandis que lui la protège comme le ferait un grand frère affectueux. Ce duo respire la franche camaraderie, la gentillesse, le bonheur d’avoir trouvé un autre être qui nous émeut, sans que l’on sache pourquoi, et qui nourrit une belle part d’humanité en nous. Leur duo arrache un sourire au lecteur qui a passé une journée morose et réchauffe le coeur. Bien entendu, chacun a sa spécialité : elle, l’analyse de données, les ordinateurs ; lui, les déductions, l’analyse des faits, la connaissance des rouages criminels.. et parfois, l’art de se jeter tête en avant face au danger, en faisant fi du plus simple instinct de survie! Ce binôme insolite est d’une efficacité redoutable, il met des coups de pieds dans les fourmillières, dépoussière les règles et nous emporte dans des conversations et/ ou dans des choix réjouissants, délicieusement transgressifs par moments.
La plume de l’auteur, ses choix pour brouiller les pistes sont toujours aussi addictifs. Nous sommes sur un 3e volet qui n’a rien à envier aux autres et qui ne fait pas redite : pas de superflu, pas de lourdeurs, le lecteur profite d’une belle saveur, et d’une belle enquête.
Ainsi, vous l’aurez compris, j’ai réellement adoré ce roman. Je ne peux que le recommander : un duo haut en couleur, riche en émotions et original; une enquête complexe à souhait, avec des ramifications intéressantes, conduisant à des révélations étonnantes. Un véritable régal.
Les Rêveries d'Isis 