L’escalier du Diable, Dean Koontz.

Jane Hawk 03 : L'escalier du diable par Koontz           Il y a un an, je redécouvrais Dean Koontz avec La Chambre des Murmures, un roman glaçant et inquiétant (lien vers la chronique ici) et depuis, j’attendais la suite avec impatience. Autant dire que lorsque j’ai reçu L’Escalier du Diable, je n’ai pas mis longtemps à l’attaquer!

      Dans ce deuxième volet, nous reprenons la traque de Jane pour déjouer le complot d’une société encore secrète. Ces hommes et ces femmes qu’elle combat transforment certaines personnes avec des nanotechnologies et usent d’un pouvoir de vie et de mort démentiel, tout en s’assurant une place de choix dans le monde.

      Le roman s’ouvre sur Sarah Holdsteck, une jeune femme détruite et ruinée par son ex-mari. Autant dire que j’ai cherché le lien avec Jane Hawks pendant quelques instants, puis je me suis laissée porter. Très vite ce lien apparaît (Simon Yegg) et nous retrouvons notre héroïne plus décidée que jamais! J’ai beaucoup aimé cette entrée en matière du roman parce que finalement, nous avons une coalition de femmes, que des hommes sans pitié, des bourreaux, pensaient avoir brisées et qui renaissent de leurs cendres pour mieux terrasser leurs ennemis. La complicité créée par des ennemis communs est très vite palpable et nous réjouit autant que le récit des atrocités subies par Sarah nous révulse.

      Le ton de ce 3e tome est plus sombre que dans le deuxième volet. Jane est enferrée dans une véritable croisade où les dés semblent pipés, et plus d’une fois, nous la croyons perdue. Elle lutte avec l’énergie du désespoir face à une structure qui déploie toujours plus avant ses ramifications. Les Modifiés par les Arcadiens sont partout, ils gangrènent toutes les strates de la société et la cruauté des gens hauts placés dans cette secte n’a pas d’égal : meurtres mis en scène et filmés, tortures, viols, vols, extorsions… rien ne les arrête, ni la famille ni les amis. La NSA et les deux hommes à la poursuite de notre héroïne en sont le parfait exemple. Cruels, ils se délectent de la souffrance de ceux qu’ils exécutent ou à qui ils injectent le sérum pour les contrôler. Dubose est particulièrement détestable. Son attitude face à Sanjay et Tanuja m’a profondément révoltée. Dean Koontz a un vrai talent pour mettre en scène des situations glaçantes mais qui ne semblent malheureusement pas impossibles dans un futur plus ou moins lointain. Quant à la bassesse et à la cruauté humaine, nul doute que ce qu’il évoque pourrait exister – et si des nanotechnologies permettaient d’assujettir et de balayer le libre arbitre, nul doute que les dérives des puissants du livre arriveraient. Cela rend le roman particulièrement inquiétant et lui confère une saveur très singulière. Nous ne sortons pas indemnes de la lecture.

       Dans un monde sans foi ni loi, notre pauvre Jane peut compter sur quelques amis, mais encore faut-il savoir si ces amis suffiront à sauver son fils Travis et à lui permettre de poursuivre son combat… d’autant qu’ils sont eux aussi plus rares que dans le tome 1. C’est ce qui rend le roman plus oppressant d’ailleurs. Jane est ici tout aussi attachante que dans La Chambre des Murmures, mais la traque qu’elle mène l’épuise et la transforme. Pour survivre, elle doit aussi s’endurcir, et parfois, jouer à armes égales avec ses adversaires. La proie devient le bourreau du méchant tombé entre ses griffes, mais à la différence de ses ennemis, ce qu’elle est réduite à faire la hante. Je ne peux qu’admirer cette femme et son courage. Elle s’est avancée trop avant pour renoncer, mais chaque pas risque de la mener au trépas et au carnage. Elle devient dans ce livre un véritable funambule effectuant une traversée sans fin au dessus de l’abîme. 

       Son fils a un rôle un peu plus grand ici aussi et j’ai adoré le croiser et voir le garçon intelligent qu’il devient. Mais l’auteur ne lui épargne rien, et mon cœur s’est serré à la lecture de ses mésaventures. Je l’ai cru sauvé, puis perdu, et quand j’ai pensé qu’il était enfin sorti d’affaire, tout s’est joué à quelques instants… La tension est donc à son comble ici et l’auteur joue très clairement avec nos nerfs en ce qui concerne Travis, mais pas seulement : pour les Washington, pour Jane, pour Booth Hendrickson…

      Enfin, j’ai adoré le revirement de situation dans les dernières cent pages, je me suis trouvée estomaquée de ne pas avoir anticipé ce qui se passerait dans l’antre du Diable. Les choix de Dean Koontz permettent de relancer la dynamique du roman et cela éclaire beaucoup de choses sur les deux cent pages précédentes : autant de petits détails distillés, que nous n’avions pas su interpréter et qui prennent enfin tout leur sens. La construction du roman est réellement au service du sens et nous avons là un thriller sans temps mort, qui aiguise  notre appétit page après page, qui nous emporte sur de fausses pistes afin de mieux nous laisser étourdis par le rythme et l’évolution des choses.

       Je terminerai sur le titre et sa symbolique. Tout au long du roman, je me suis demandé ce qu’était cet Escalier du Diable. Au début, on ne nous en parle pas, puis le nom apparaît, vient, revient, mais sans que l’on ait la moindre idée de ce dont il s’agit. La révélation n’en est que plus éclatante! La description des lieux est terrifiante, elle fait froid dans le dos et illustre à la perfection la folie des Arcadiens et de leur projet sociétal. Une fois ce lieu énigmatique atteint, le roman atteint lui aussi son acmé et l’intensité ne baisse plus jusqu’aux dernières lignes. 

       Au terme de ce troisième tome, Jane Hawks n’a pas fini son oeuvre. Le lecteur pourrait se lasser, trouver des redites dans ce jeu du chat et de la souris entre l’ex-enquêtrice et les acteurs de la conspirations… Mais non. Ce n’est pas le cas. L’intrigue est sans cesse relancée, l’histoire avance et, à chaque page, nous soulevons un peu plus le voile de l’horreur qui se trame en sous-marin.

       Ainsi, L’Escalier du Diable est un excellent thriller, saisissant et haletant totalement en lien avec la Modernité dans tout ce qu’elle a de terrifiant, et saupoudré d’un zeste de turpitudes humaines. Par son écriture et par la construction du livre, Dean Koontz attise notre curiosité et souffle sur les braises de nos peurs pour nous laisser essoufflés et étourdis à l’issue du livre. 

 

 

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